Étude de l’effet du statut socioéconomique parental sur le développement cérébral précoce (période fœtale) et tardif (enfance et adolescence)
Auteur(s) : MATHAN Julia
Date de soutenance : 2024
Thèse délivrée par : Université Paris Cité
Section(s) CNU : section 69 : Neurosciences
Sous la direction de : Arnaud CACHIA
Jury de thèse : Arnaud CACHIA ; Christine ASSAIANTE ; Guillaume AUZIAS ; Lucie HERTZ-PANNIER ; Sébastien GOUDEAU ; Iris MENU
"L'étude du développement neurocognitif, qu'il soit précoce (fœtal) ou tardif (enfance et adolescence), nécessite une approche multidimensionnelle, intégrant plusieurs niveaux d'analyse du vivant : moléculaire (génétique), cellulaire (neurones), macroscopique (réseaux neuronaux), et environnemental (facteurs socio-économiques, culturels et pédagogiques). Des données croissantes montrent l’influence du statut socio-économique (SES) sur le développement cérébral, mettant en lumière la dynamique complexe entre SES, fonctions cognitives, psychopathologies et organisation cérébrale. La période prénatale apparaît comme une phase critique, posant les fondations de la cognition et de la santé physique et mentale. En effet, l'interaction de facteurs parentaux à la fois génétiques et environnementaux façonne durablement le comportement des individus. En parallèle, le développement cérébral plus tardif, durant l’enfance et l’adolescence, constitue une période sensible, au cours de laquelle des modifications cérébrales peuvent survenir en réponse aux stimuli environnementaux, via le mécanisme de neuroplasticité. Des environnements riches et stimulants renforcent les réseaux synaptiques, tandis que des environnements stressants peuvent entraver certains processus neurocognitifs. Dans ce contexte, la première partie de la thèse a permis d’explorer les effets interdépendants du SES parental, en tenant compte des facteurs génétiques sous-jacents (scores de risque polygénique associé au SES) et du volume cérébral, sur deux indicateurs du développement fœtal : le poids à la naissance et le motif des sillons corticaux. Pour modéliser ces relations complexes, une analyse multivariée par équations structurelles (SEM) a été réalisée auprès de 203 participants sains âgés de 9 à 17 ans. Dans la seconde partie de la thèse, la même méthode a été utilisée pour étudier l’effet du SES parental sur la neuroplasticité, en mesurant les changements anatomiques via des scores de changement latent. Cette seconde étude visait à préciser l'influence du SES, toujours en tenant compte des facteurs génétiques sous-jacents, sur la neuroplasticité liée à un entraînement cognitif intensif chez les même participants sains âgés de 9 à 17 ans. Les analyses révèlent un effet du SES parental sur le motif de sillon du cortex cingulaire antérieur gauche, une mesure indirecte du neurodéveloppement prénatal. De plus, l'entraînement cognitif a conduit à des modifications du volume des régions associatives chez les enfants, modifications influencées par le SES parental et les facteurs génétiques associés. Ces effets étaient plus marqués chez les enfants issus de milieux socio-économiques plus faibles. En conclusion, ces travaux soulignent l’effet des disparités socio-économiques sur des périodes critiques du développement cérébral, au niveau prénatal et durant l’enfance et l’adolescence. Le SES parental influence la structure cérébrale dès les premières étapes du développement, suggérant un mécanisme de transmission intergénérationnelle des inégalités socio-économiques. Néanmoins, la neuroplasticité associée à l’apprentissage après la naissance peut fournir un mécanisme compensatoire chez les enfants et adolescents issus de milieux moins favorisés."
Study of the effect of parental socioeconomic status on early (fetal period) and late (childhood and adolescence) brain development
"The study of early (fetal) or late (childhood and adolescence) neurocognitive development, requires a multidimensional approach that integrates several levels of analysis: molecular (genetic), cellular (neurons), macroscopic (neural networks), and environmental (educational, socio-economic, and cultural factors). Increasing evidence highlights the influence of socio-economic status (SES) on brain development, emphasizing the complex dynamics between SES, cognitive functions, psychopathologies, and brain organization. The prenatal period emerges as a critical period, laying the foundation for cognition as well as physical and mental health. Indeed, the interaction of genetic and parental environmental factors has a lasting impact on offspring behavior. At the same time, later brain development during childhood and adolescence represents a sensitive period in which brain changes can occur in response to environmental stimuli, mediated by the neuroplasticity mechanism. Enriching and stimulating environments enhance synaptic networks, while stressful environments may hinder certain neurocognitive processes. In this context, the first part of the thesis explored the interdependent effects of parental SES, including underlying genetic factors (polygenic risk scores) and brain volume, on two indicators of fetal development: birth weight and the patterns of cortical sulci. To model these complex relationships, a multivariate structural equation modeling (SEM) analysis was conducted with 203 healthy participants aged 9 to 17 years. In the second part of the thesis, the same methodology is used to examine the effect of parental SES on neuroplasticity, based on anatomical changes, using latent change scores. This second study aimed to clarify the influence of SES, accounting for underlying genetic factors, on neuroplasticity related to intensive cognitive training among the same healthy participants aged 9 to 17 years. The analyses reveal an effect of parental SES on the sulcal pattern of the left anterior cingulate cortex, an indirect measure of prenatal neurodevelopment. Furthermore, cognitive training led to changes in the volume of associative cortical regions in children. These changes are influenced by parental SES and associated genetic factors and were more pronounced in children from lower socio-economic backgrounds. In conclusion, these findings underscore the impact of socio-economic disparities during critical periods of brain development, both prenatally and throughout childhood and adolescence. Parental SES influences brain structure from the earliest stages of development, suggesting a mechanism for the intergenerational transmission of socio-economic inequalities. Of note, the neuroplasticity associated with postnatal learning can provide a compensatory mechanism in children and adolescents from less advantaged backgrounds."
URL : https://theses.hal.science/tel-04979799v1
mot(s) clé(s) : apprentissage et développement cognitif, origines socioculturelles