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     Langue(s) : français 

Évaluation du plan « 1 jeune 1 solution »


Auteur(s) :  Paul-Emmanuel Chouc, Francesco Filippucci, Manon Garrouste, Enora Messi, Audrey Rain, Arne Uhlendorff

Editeur(s) :  Institut des politiques publiques (IPP)

Date :  01/2024

 

Contexte et enjeux

Le plan « 1 jeune 1 solution » a été mis en place en juillet 2020 dans le cadre du plan France Relance. Il mobilise différents leviers pour proposer une solution à chaque jeune, via un accompagnement renforcé pour les jeunes éloignés de l’emploi (financements supplémentaires de la Garantie jeunes par exemple), la formation ou le soutien à l’embauche pour faciliter l’entrée dans la vie professionnelle. Au total, le plan « 1 jeune 1 solution » représente une dépense publique de près de 10 milliards d’euros sur la période 2020-2022 selon la Cour des comptes. Parmi les mesures mises en place, l’aide exceptionnelle versée pour embaucher des jeunes en apprentissage représente la mesure la plus coûteuse du plan, avec plus de 5 milliards d’euros, selon l’estimation de la Cour des comptes. Par ailleurs, le développement de l’apprentissage constitue, depuis plusieurs années, l’un des piliers des politiques d’emploi destinées aux jeunes, avec l’espoir de favoriser une meilleure et plus rapide intégration professionnelle.

Présentation

Ce rapport se concentre sur l’impact de l’aide exceptionnelle versée dans le cadre du plan « 1 jeune 1 solution » durant la première année de sa mise en oeuvre, entre juillet et décembre 2020. Les auteurs mesurent l’impact de cette aide de l’Etat sur le nombre d’apprentis recrutés et montrons ensuite quel impact l’apprentissage peut avoir sur les trajectoires scolaires des étudiants en exploitant une réforme antérieure au plan « 1 jeune 1 solution ».

Résultats clés

Un taux de recours variable à l’aide exceptionnelle

En moyenne, les entreprises de moins de 250 salariés touchent 5 960€ par apprenti embauché contre 2 830€ pour celles de plus de 250. On observe cependant une large hétérogénéité parmi ces dernières : les entreprises de plus de 250 salariés qui sont loin d’atteindre les objectifs nécessaires en termes d’embauches de contrats d’insertion professionnelle recourent moins souvent à l’aide exceptionnelle que celles qui sont déjà proches de la cible à atteindre.

Une forte hausse de l’embauche d’apprentis

La mise en place de l’aide exceptionnelle est concomitante avec une importante hausse du nombre d’apprentis embauchés par rapport à 2019 : le nombre d’apprentis embauchés augmente de plus de 40%pour atteindre 479 000. La part d’apprentis recrutés par rapport au nombre total d’embauches dans chaque entreprise double : entre 2016 et 2019, le recrutement d’apprentis représente en moyenne 1,7% des embauches totales, contre 3,3% en 2020. On peut également mesurer cette évolution par type d’entreprise, selon leurs pratiques antérieures en termes de recrutement d’apprentis. En 2020, les trois quarts des apprentis embauchés le sont par des entreprises ayant déjà recruté au moins un apprenti durant les années précédentes. Néanmoins l’année 2020 se démarque par une hausse significative du nombre d’entreprises qui embauchent un apprenti pour la première fois. Enfin, on peut noter que la hausse du nombre d’apprentis embauchés observée en 2020 est principalement tirée par des apprentis dont le niveau du diplôme préparé est supérieur au bac.

L’impact de l’aide exceptionnelle sur l’embauche d’apprentis

Les auteurs montrent que les entreprises percevant en moyenne une aide plus élevée de l’Etat pour l’embauche d’apprentis recrutent effectivement un nombre d’apprentis plus important. En particulier, les entreprises de moins de 250 salariés perçoivent un montant d’aide moyen plus élevé que celles de plus de 250 salariés, qui doivent satisfaire des critères supplémentaires pour bénéficier de l’aide exceptionnelle.

Ainsi, les entreprises légèrement au-dessus du seuil de 250 salariés ETP embauchent 18% d’apprentis en moins par rapport aux entreprises légèrement en-dessous de ce seuil. Cette différence est principalement tirée par les structures pour lesquelles la cible d’embauches de contrats d’insertion professionnelle n’est pas encore atteinte : elles recourent moins souvent à l’aide exceptionnelle et embauchent ainsi un nombre plus limité d’apprentis que des structures comparables qui ne font pas face à ces contraintes.

Les auteurs montrent par ailleurs que la hausse des embauches d’apprentis ne s’est pas faite au détriment de profils similaires sur le marché du travail : ils ne trouvent pas d’effet de substitution avec des personnes en contrat temporaire ou en stage. Au total, l’aide exceptionnelle a bien un impact global positif sur l’embauche d’apprentis. Les auteurs estiment que 80 500 embauches d’apprentis en 2020 peuvent être attribuées à la mise en place de l’aide exceptionnelle, ce qui représente 56% de la hausse des embauches observée entre 2019 et 2020. Cette estimation chiffrée doit cependant être utilisée avec prudence dans la mesure où elle repose sur l’hypothèse que l’échantillon utilisé pour l’estimation est représentatif de l’ensemble des entreprises bénéficiant de l’aide exceptionnelle.

L’impact de l’apprentissage sur la probabilité d’interruption de la formation

Sur la période considérée, la probabilité de préparer un BTS par la voie de l’apprentissage plutôt que par la voie scolaire augmente de façon significative : elle passe de 22% en 2017 à 39% en 2021. Nous montrons que cette évolution fait suite à la libéralisation du marché de l’apprentissage en 2018, qui a permis de diminuer la distance moyenne au CFA le plus proche pour les élèves. La stratégie empirique mise en oeuvre montre ensuite que pour les étudiants en BTS, la formation en apprentissage plutôt que par la voie scolaire diminue la probabilité d’interrompre la formation à la fin de la première année de 19% l’année suivant la mise en place de la réforme.

Les auteurs analysent également cet impact pour les étudiants en CAP, cependant les résultats sont difficilement interprétables dans la mesure où la diminution de la distance au CFA le plus proche est moins importante. Ils n’observent l’impact de la réforme qu’un an après sa mise en place : l’accès à des données plus récentes est susceptible de préciser ces premiers résultats.



Télécharger le document :  https://www.ipp.eu/.../1_jeune_1_solution_apprentissage-1.pdf


mot(s) clé(s) :  alternance et apprentissage, politiques éducatives, relation formation - emploi