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Un moment et un temps dans la réalité sociale et éducative contemporaine brésilienne : des relations raciales et sociales traversées par une institutionnalisation ambiguë du principe de colonialité


Auteur(s) :  FRESSINEL-MESQUITA Elodie

Date de soutenance :  2019

Thèse délivrée par :  Université de Limoges

Section(s) CNU :  section 70 : Sciences de l'éducation

Sous la direction de :  Patricia BESSAOUD-ALONSO

Jury de thèse :  Patricia Bessaoud-Alonso ; Jacques Béziat ; Sébastien Pesce ; Gilles Monceau ; Philippe Colin ; Roberta Romagnoli

 

"J’ai souhaité, dans ce travail doctoral, mener une réflexion sur la société brésilienne actuelle, société issue d’une histoire marquée par la colonisation portugaise et l’esclavage qui, sous la traite transatlantique, a pris un essor considérable. L’époque contemporaine, après avoir entretenue le mythe de la démocratie raciale en plaçant notamment le métissage comme garant de l’unité sociale du pays a reconnu politiquement et institutionnellement une différenciation raciale et sociale de la population, l’existence d’un racisme latent mais bien réel et des inégalités multiples qui se cristallisent et s’illustrent aussi à l’intérieur de l’école brésilienne. Dans le cadre d’une ethnicisation des politiques publiques brésiliennes et l’instauration, à partir des années 2000, des actions affirmatives, outils d’une politique de discrimination positive, des dispositifs institutionnels se mettent en place, tels qu’un système de quotas raciaux, l’instauration dans le cursus scolaire de l’obligation d’enseigner l’histoire et la culture africaine et afro-brésilienne, dans le but d’une réduction de ces inégalités et des conséquences du racisme pour une meilleure intégration de la population noire et métisse brésilienne.A la lumière de la pensée décoloniale latino-américaine, l’enjeu de ce travail était de mettre en évidence l’existence et la perpétuation au sein de l’imaginaire social-historique brésilien d’une colonialité du pouvoir, du savoir et de l’être maintenant des rapports sociaux racistes et racialisés sous couvert d’une vision eurocentrique et occidentale et une norme implicite de l’idéologie du blanchiement. Avec l’appui d’une approche théorique et méthodologique multiréférentielle alliant l’approche socio-historique, la démarche clinique et le cadre théorique de l’Analyse Institutionnelle, et la mise en place, sur le terrain d’étude, Ribeirão Preto, une ville de l’état de São Paulo, d’observations de type ethnographiques et d’entretiens compréhensifs, j’ai présenté une double analyse de mes données de terrain. L’analyse de la parole, de discours, de comportements, de situations vécues et ou relatées a permis de pointer de quelle manière se manifestaient ces différentes formes de colonialité dans et par le parcours de vie et le quotidien des personnes rencontrées. Elle a également mis en évidence une tension entre l’objectif institutionnel affiché et la mise en œuvre sur le terrain d’une politique remise en question et qui pourrait favoriser un paradigme que j’ai nommé intégrant-excluant, s’illustrant par une nécessité d’une auto-identification et d’une catégorisation d’une partie de la population brésilienne, pour bénéficier de l’obtention des mesures intégratrices qui peuvent être perçues et vécues comme excluantes et injustes. Enfin, je propose un travail de conceptualisation autour de la notion de bio-pouvoir et une réflexion autour d’enjeux éducatifs visant à aller vers un processus de décolonialité par une perspective critique interrogeant la déconstruction des significations imaginaires sociales dans une perspective de transformation de l’institutionnalisation de ce paradigme implicite mais bien présent."

A moment and a time in contemporary brazilian social and educational realities : racial and social relations viewed in light of the ambiguous institutionalization of the principle of coloniality

"In this doctoral work, I reflect on contemporary Brazilian society and how its history has been marked by Portuguese colonization and slavery, which gained considerable ground under the transatlantic treaty. By viewing interbreeding as the guarantor of social unity, thereby keeping alive the myth of a racial democracy, contemporary society politically and institutionally recognizes that populations differ on social and racial grounds. As a result, a latent but very real racism exists, as well as multiple, increasingly apparent inequalities, of which Brazilian classrooms are a reflection. Under the ethnicization of Brazilian public policy and the introduction of affirmative action, which is a tool for a politics of positive discrimination, institutional means were put in place at the turn of the 21st century to reduce inequalities and other consequences of racism, such as a system of racial quotas and the introduction of mandatory African and Afro-Brazilian cultural-historical studies; and all this in an effort to better integrate the black and mixed Brazilian population. This work uses decolonial thinking to prove that, deep down in the Brazilian social-historical imagination, the coloniality of power, knowledge, and being, racialized social relations not only exists, but is also being perpetuated under the guise of a Eurocentric and Occidentalist vision, as well as a norm implicitly rooted in the ideology of “whitewashing”.The work is based on a multi-referential approach, which blends together a socio-historical approach, the clinical process and the theoretical framework of Institutional Analysis. It also puts forward, through field research in Ribeirao Preto, a town in the state of Sao Polo, ethnographical observations and comprehensive interviews, all of which will allow me to present a dual analysis of my field research.Analyzing words, speeches, behaviors, and lived experiences is crucial to understanding that these different forms of coloniality manifest themselves in the daily lives of people. It also proves that there is a tension between institutional aims and the putting in place, in real life, of a politics that calls itself into question and favors what I call an “integrating-exclusive” paradigm. This paradigm is illustrated by the necessity of auto-identifying and categorising a part of the Brazilian population, in an attempt to benefit from the production of inclusive measures perceived and experienced as excluding and unjust.Finally, this work is an attempt at once to conceptualize the notion of bio-power, and to reflect on the educational stakes rooted in attempts to direct us towards a decoloniality process, by way of a critical perspective capable of calling out and pointing fingers at the destruction of social imaginaries. In doing so, we hope to transform the institutionalization of this implicit, yet very real, paradigm."



URL :  http://theses.fr/2019LIMO0007/document


mot(s) clé(s) :  discrimination, sociologie de l'éducation